Stéphane Pajot paie sa tournée. Dans Parlez-vous bistrot ?, opuscule à glisser entre
n'importe quel Blondin et les Brèves de comptoir de Gourio, le journaliste nantais s'immerge dans l'argot des rades. On y apprend qu'être "vacciné au salpêtre", c'est avoir toujours soif, qu'une "route à trois grammes" est un itinéraire bis où l'on est sûr de ne pas croiser la maréchaussée ou qu'un "obus" est un ventre velouté, bref, une "cabine avancée". Quant à la définition du "barreau de chaise", je ne vous ferai pas l'affront de vous demander ce qu'elle signifie...
Au fil de cet abécédaire, on croise à plusieurs reprises Ernest Hemingway, qui avait l'élégance rare de cultiver le respect de ces lieux, sans distinction de pedigree, du palace parisien à la plus modeste bodeguita de la Havane. Du moment que la vie s'y faisait moins rugueuse... Un peu comme à La Pomponnette, rue Lepic, où Stéphane Pajot, toujours prêt à dégainer son carnet de notes, aime monter pour collecter souvenirs et belles saillies. En particulier lorsque Michel Langlois est dans les parages. Langlois ? "Charcutier-poète", il a connu Jacques Prévert et Bernard Dimey. Son jambon persillé est un délice, mais je m'éloigne du sujet...
Je reprends. Journaliste à Presse-Océan, notre auteur consigne depuis quelques années la grande et la petite histoire de la Cité des Ducs de Bretagne, dans les colonnes du quotidien et aux éditions d'Orbestier. On lui doit, parmi près de trente ouvrages, Nantes fascinante et Les Nantais, où l'air de rien, il insuffle vie et couleurs à des lieux et des personnages qu'on imaginait à jamais figés dans un oubli noir et blanc.
Il y a un an environ, le regretté Julien Gracq en personne lui a téléphoné depuis sa retraite de Saint-Florent-Le-Vieil pour le remercier de lui avoir envoyé Nantes fascinante. Stéphane n'ose pas le dire, mais je crois bien que le vieil homme en a profité pour le féliciter. Pour le croiser pour de vrai, les plus motivés le chercheront à La Perle, rue du Port-au-Vin, l'un des derniers zincs nantais où sourires et conversations croisent le tir au-dessus des ballons. Vous le reconnaîtrez facilement, il y promène une carcasse de grand ado et des pupilles trop petites pour cacher l'immense gentillesse que trahit son regard.
http://www.stephanepajot.fr.st/
Ci-dessus : Deuxième en partant de la droite, Hem' rhabille les mariés au Floridita (La Havane).
Merci !
Grâce à toi, je n'ai plus besoin de me creuser les méninges pour trouver le dernier cadeau !
Peintre
Rédigé par : Peintre | 27 décembre 2007 à 20:08