Ex-fumeur de pipe (les Peterson of Dublin figuraient parmi ses favorites...), Julio Ballester a doté son héros d'une fidèle bouffarde. Voici donc Jorge Bernall, poète espagnol, au soir de sa vie. Nous sommes en 1979. Ex-activiste de gauche, hirsute, Bernall voit son oeuvre récompensée par un prix littéraire, dans les jardins d'une propriété sise au bord du lac de Côme. Las, l'homme de lettres ne profite pas longtemps de ses lauriers : deux coups de feu retentissent. Abattu, il tombe à l'eau et se vide peu à peu de son sang… Sous ses yeux vitreux défilent alors, en Technicolor, ses débuts à Paris, la peau laiteuse d'une femme (et la moiteur fraîche de sa bouche), le papier sépia de ses premiers billets dans la presse de charme, bientôt évanouis dans les volutes sucrées exhalées par sa pipe fétiche (une straight, pour les connaisseurs). Le tout tient en équilibre sur un fil tendu entre nostalgie fifities et modernité graphique (la narration, en perpétuel changement de braquet, n'a rien de pépère). Ajoutez une pointe de militantisme rouge vif pour le brûlant sur la langue et vous y êtes : Jorge Bernall / Georges Caplan l'insaisissable s'avère finalement plus proche de vous que vous ne le pensiez. Le chic type intemporel, en somme.
Georges Caplan vous parle..., de Julio Ballester, éd. Paquet, 16,50 €.
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