C'est le casse-tête perpétuel des sauts de puce à l'étranger. Devant soi : une capitale, 72 heures à vivre et une liste de passages obligés à vous couper les pattes (restaurants, monuments, musées, photos, postures...). Consignées soigneusement à l'intérieur du Moleskine, les adresses soufflées par les amis. Dans la poche de la veste, le guide de voyage. Autant de clés destinées à vous livrer une ville idéalement balancée - mensurations, humeur - sur un plateau. On en oublierait presque le plan B : faire valser les balises, laisser ce double de vous-même (le jouisseur, pas le masochiste) vous bander les yeux. Qu'il vous attrape par les épaules, jette aux orties votre guide bavard et vos notes studieuses. Quelques heures plus tard, vous recouvrez la vue. Vous voilà au bord d'une grande avenue, poussé à table, serviette sur les genoux, devant une morue rhabillée à la sauce Village People...
C'était à la brasserie Quebra Mar, avenue de la Liberté, en haut du quartier de la Baixa. La tablée d'à côté, une brochette de français du Team Chevrolet, noyait bruyamment son dépit suite à l'annulation du rallye Lisonne-Dakar 2008. Plus sobres, nous avons fait déboucher une demi-bouteille de blanc, un vinho verde tout simple de Monte Velho et commandé deux morues de la casa. Deux caquelons de crevettes sautées à l'ail nous offraient de patienter. Une entrée sans surprise, roborative et sincère. Nos voisins ont fini par prendre congé, le pas lourd, non sans avoir jeté un définitif "C'est quand même grâce au Dakar que maintenant, les gens partent au soleil en hiver" lorsqu'un flash multicolore a déboulé sur notre table.
Une boule à facettes dans un lac de sauce. Une carte postale seventies. Des noces pop entre jaune, rouge et vert. Ne manquaient plus que les Village People et Guy Lux au micro. C'était bien notre morue. Bigrement fardée mais pimpante. D'abord panée, la pauvre avait été drapée d'une tranche de jambon cru, nappée de béchamel puis de fromage fondu. Ultimes banderilles : une rafale de chips maison. Sous la fourchette, le tout se laissait découper. En bouche, onctueux, l'ensemble se tenait. Du gras, bien sûr, du fondant, une pointe de moutarde à l'anglaise pour une note inattendue - comme si les Beatles débarquaient pour un "Yeah, yeah, yeah" frétillant avant de reprendre l'avion - autour d'un poisson blanc comme l'écume, éclatant de fraîcheur. Il nous aurait presque fait un clin d'oeil, content de sa facétie patte d'éph'. Déroutant. Un authentique aller-simple pour une autre dimension. Digeste ? No comment.
54 euros à deux, prévoir un déjeuner léger le midi.
Quebra Mar, 77 avenue de la Liberté, Lisbonne. Tél : 21 346 48 55
(Photos B. Wagner)
A suivre, la Casa Havaneza, civette majeure de Lisbonne.
J'adore ! Encore !!!!
Rédigé par : gaelle szymandme | 09 janvier 2008 à 00:07
on imagine très bien... on voit la scène, on entend tes pas sur le trottoir portugais, on goutte et savoure cette morue disco. et biensur, on en veut encore.
Rédigé par : claire | 08 janvier 2008 à 09:15